jeudi 20 décembre 2012, par Comité Valmy
Maurice Audin mort à 25 ans sous la torture, en juin 1957 pendant la Bataille d’Alger
Si nous fouillons juste un peu la question dite mémorielle, on douterait très vite qu’elle relève de la simple idée qu’il suffirait de passer le cap d’un « passé non assumé ». Car l’accès à la réalité des choses est rarement immédiat, il faut toujours la chercher derrière les monceaux d’apparence qui la recouvrent pour n’en laisser rien paraître qui soit concret. Pour cela, il faut d’abord traiter de la colonisation, pas du point de vue sentimental ou événementiel, mais selon le principe qu’elle constitue l’une des formes de domination des peuples, qui ne relève ni de la chevalerie ni d’une quelconque morale.
On peut dès lors comprendre l’inutilité des « mots justes » et
du « regard lucide », et de toutes les formules diplomatiques
qui ne servent que la cosmétique imposée
par un rapport de force conjoncturel, où la
canonnière ne peut être productive. La colonisation
a servi à garantir les intérêts de l’empire français,
elle a été pensée et exécutée sans état d’âme,
c’est un fait. La colonisation a connu sa fin sans
être remise en cause par ses promoteurs, c’en est
un autre. Jusqu’au bout, l’Etat français a oeuvré à
maintenir son emprise sur l’Algérie. Ce n’est pas le
remords ou la mansuétude qui ont provoqué le
retrait de l’occupation et la reconnaissance de l’indépendance,
ce fut l’ultime assaut des Algériens
contre le crime qui les a imposés dans une dernière
bataille, où ils ont réussi à démontrer qu’ils
avaient définitivement décidé de se libérer de la
servitude. Et le système géniteur, vaincu, est toujours
là à qui certains naïfs demandent de la
« repentance », en ayant peut-être espoir de le voir
abandonner une option qu’il porte malgré lui, de
laquelle dépend sa survie et qui constitue son dernier
recours, s’il est acculé. Comme il commence
à l’être et qu’il tente sous une forme améliorée de
revenir à l’asservissement des peuples.
Sous cet angle, la visite de François Hollande doit être
considérée selon ses objectifs et non son décorum,
selon ce qui la fonde et non les « petites
phrases » qui font baver la presse en mal de sentimentalisme
à vendre. Ce sera déjà beaucoup qu’il
soit dit à Josette Audin et à sa famille où se trouve
le corps de Maurice assassiné par les paras des
Massu-Bigeard.
Pour le reste, en marge du service à la « mémoire », il faudra plutôt que nos gouvernants utilisent à fond le contexte international et la bonne santé financière de l’Algérie pour négocier au mieux les relations économiques entre les deux pays. En se rappelant que la valorisation de la souveraineté nationale, chèrement acquise, commande en priorité de promouvoir le développement de notre économie et non de subir le déversement des produits importés. Disons clairement que si M. Hollande a priorisé l’Algérie, causant une crise gastrique à l’« ami » makhzénien, ce n’est certainement pas dû à un quelconque penchant. Pour le doute, disons que ce n’est pas seulement pour cela et que c’est probablement, aussi, pour faire oublier les turpitudes de son prédécesseur et son insolence. Il y va de la survie des entreprises de son pays qui se font balayer tous les jours de nombre de « marchés ».
Ahmed Halfaoui
Jeudi 20 décembre 2012
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